Aléria, située sur la côte de la Costa Serena à 15 kilomètres de Ghisonaccia, est la ville parfaite pour les mordus d’archéologie : car Aleria, ne l'oublions pas, reste la capitale de la Corse antique. C'est aussi un endroit propice aux escapades en pleine nature. La plaine est en effet très fertile, au grand bonheur des viticulteurs, arboriculteurs et agrumiculteurs. Les balades y sont très agréables. Et pour terminer, un tour sur les étangs d’Urbino et de Diane viendra parfaire votre journée...
Au sommaire- L'histoire d'Aleria, des Grecs aux Romains
- Visiter Aleria et ses environs
- Aléria et la "mal'aria"
L'histoire d'Aleria, des Grecs aux Romains
Le passé d’Aléria est mouvementé. Tous les peuples venus en Corse se la sont arrachée. Sa position géographique y est bien sûr pour quelque chose : située à une cinquantaine de kilomètres de Corte (pour rejoindre les montagnes), proche des autres ports de la côte, en liaison directe avec la côte Ligure et dans une plaine agricole qui plus est.


Revenons quand même rapidement sur les différentes origines d’Aléria. L'historien Louis Villat nous disait, en 1916, que "la Corse n'entre vraiment dans l'Histoire qu'au 6ème siècle avant J.-C., avec l'arrivée des phocéens fugitifs. Ce sont eux qui ont définitivement "découvert" la Corse et inauguré une colonisation qui se poursuivra désormais sans arrêt".
Déjà l'île - et sa nouvelle capitale Alalia, plus tard Aleria - compte parmi les points-clés de la Méditerranée. Les Grecs la nomment "Kurnos", tandis que "les indigènes l'appellent Korsis", selon Denys le Périégète (4ème siècle). Comme les Romains plus tard l'appelleront "Korsika".
Actifs, industrieux, les Grecs développent la prospérité de la colonie primitive. Ce sont eux qui apportent la vigne et le vin, l'olivier et l'huile, ou encore le blé et le pain. Et plus important encore : l'écriture.

Le problème, c'est que les Étrusques, puissance majeure de la côte ligurienne, n'apprécient pas trop de voir ces nouveaux voisins prendre leurs aises dans cette région de la Méditerranée. Ils s'arrangent donc avec les Puniques (Carthage) pour aller bouter les Grecs hors de Corse.
"La ville d'Alalia ne devait pas connaître une splendeur plus grande ; moins de 20 ans après l'arrivée des phocéens d'Asie, elle succombait sous les coups de ses ennemis", une coalition étrusco-punique s'étant formée pour les chasser de cette partie de la Méditerranée.
La présence courte en termes de durée, mais profonde en termes d'influences des Phocéens, transforme durablement la culture et la vie des corses du versant oriental de l'île. Puis c'est au tour des puniques/carthaginois, "délivrés sur mer de leurs rivaux redoutables", qui ne laissent en réalité à Aleria que quelques garnisons.

"Rome songe à la Corse dès le 5ème siècle av. J.C., y envoie une colonie au 4ème, et l'arrache définitivement aux Puniques en 259, avec la conquête de Lucius Scipio". Mais l'esprit insulaire est farouche ; la révolte éclate régulièrement contre l'envahisseur et les lourds tributs collectés.
Entre -231 et -227 (les dates varient selon les historiens), Rome passe la Corse sous régime provincial, en la rattachant à son île-soeur, la Sardaigne. Mais l'ordre ne règne pas. Plusieurs épisodes de la "conquête de 100 ans" en Corse sont restés dans les annales romaines. Les Romains envoient à plusieurs reprises des milliers de soldats pour mater les insurgés, avec parfois de véritables massacres, comme en 173 av. JC : l'histoire raconte que 7000 corses furent massacrés, et près de 2000 prisonniers pour finir esclaves.
Durant toute la domination romaine, soit 8 siècles, Aleria reste le seul véritable centre urbain en Corse. Certains historiens tentent de nous donner une idée de la population : il paraît que la cité comptait jusqu'à 20 000 habitants. Un nombre énorme quand on pense aux 30 000 à 50 000 âmes qui peuplaient supposément l'île dans l'Antiquité... Les plus grands noms de Rome y passent, que ce soit Cicéron, Pompée ou César. Et plus tard Sénèque, envoyé en exil dans cette île dont il peindra un tableau peu flatteur.
Avec la chute de l'Empire Romain, les Vandales débarquent au début du 5ème siècle et ravagent la plaine orientale. Aleria s'effondre. Même si Rome n'a jamais vraiment conquis toute l'île, les implications de sa présence politique, militaire et culturelle marquent profondément son peuple pour les millénaires à venir.
Visiter Aleria et ses environs
Pour une plongée dans l’antiquité, direction le musée Jérôme Carcopino ! Installé dans l’ancien fort Génois, le fort Matra, le musée abrite tous les vestiges retrouvés lors des fouilles d’Aléria. Un flashback de 8000 ans. Vous y verrez des céramiques, des vases, des bijoux, des pièces de monnaie, des armes… aux origines Grecques, Etrusques et Romaines, bien sûr.
Pendant que vous êtes dans l’archéologie, profitez-en pour visiter le site d’Aléria (il est gratuit, mais peut-être que l'accompagnement d'un guide local pourrait vous apporter une expérience plus mémorable). La visite donne accès à la ville Romaine avec son forum, son capitole, ses temples, ses thermes et même sa villa. L'ensemble est néanmoins moins spectaculaire que sur d'autres sites similaires en Méditerranée.

Autres distractions : au nord et au sud de la ville, les 2 étangs. Celui de Diane et celui d’Urbino. L’étang de Diane n’est qu’à 3 kilomètres d’Aléria (une idée de promenade à vélo ?). Il est le lac le plus profond de Corse et n’est séparé de la mer à certains endroits que par une bande sableuse d’1 km. Vous pourrez y observer de nombreuses espèces d’oiseaux et de poissons.
L’étang d’Urbino est à la limite sud d’Aléria. Il est bordé par des pozzi (marais), une forêt et des collines. Diversifié. Vous y verrez des parcs pour la culture des huitres et des moules. Une dégustation s'impose alors...
Les plus gourmand(e)s pourront également apprécier le savoir-faire local en termes de viticulture et de production d'alcool ; de nombreux domaines font la réputation de la Corse sur ce territoire, dont la fameuse distillerie Mavella, qui nous a offert le Whisky corse P&M.
Aléria et la "mal'aria"
La plaine n’a pas toujours été cette terre propice à la culture et à l’élevage comme nous la connaissons aujourd’hui. Au 19ème siècle, elle était même devenue invivable. En cause : les moustiques porteurs du paludisme, infectant des milliers de personnes dans la plaine. Il a fallu une pulvérisation massive de DDT sur toute la région après la Seconde Guerre Mondiale pour assainir les plaines.