© Sébastien Leroy
bonifacio bastion falaises

D'Ajaccio à Bonifacio, un road-trip sur les routes sinueuses de l'Extrême-Sud

Par Sébastien 9 min. de lecture
  • Familial
  • Aventure
  • Patrimoine naturel
  • Immersion culturelle
  • Surfréquentation
5/5

Sur le littoral occidental de l’île existe une route riche d’un patrimoine culturel et naturel singulier. La territoriale 40 et ses 130 kilomètres d’asphalte connectent Ajaccio à Bonifacio en traversant des vallées sauvages, en enjambant fleuves et rivières, et en permettant de découvrir certaines merveilles de l’île. Embarquez à mes côtés pour ce road-trip coloré qui peut également être réalisé depuis la selle d’un vélo - pour les plus intrépides.

Au sommaire
  • Départ d'Ajaccio, la Cité Impériale
  • Passage par le Sartenais, territoire millénaire
  • Sur les traces des "orii" de l’Extrême-Sud
  • L'insolite Ermitage de la Trinité
  • Débarquer sur la cité des falaises
  • Jeter l'ancre (ou presque) près des Lavezzi et et de Cavallo

Départ d'Ajaccio, la Cité Impériale

Entre le golfe du Valinco et celui de Sagone, est ancré le golfe d’Ajaccio. D’une largeur de 15 kilomètres, il est délimité par deux avancées en mer avec Capo di Muro au sud et la pointe de la Parata au nord, prolongée par l’archipel des Sanguinaires.

golfe d'ajaccio © Sébastien Leroy
Une vue imprenable sur le golfe d'Ajaccio.
tour sanguinaire ajaccio © Sébastien Leroy
Les lueurs du couchant colorent la tour des Sanguinaires.

Classé Grand Site de France depuis 2017, l’archipel est composé d’un ensemble de 4 îlots rocheux d’origine magmatique à la couleur sombre. Havre de paix pour la biodiversité, la flore est forte de 150 espèces rares et endémiques, certaines étant même absentes du reste de la Corse. Au milieu de cette végétation foisonnante, nichent et voltigent au-dessus de la mer des colonies d’oiseaux marins en toute quiétude.

Célèbre pour Napoléon Bonaparte, la Cité Impériale vaut également le détour pour ses ruelles animées, son marché bien achalandé, et ses plages à l’eau turquoise telle celle de Capo di Feno.

des clients sur le marché d'ajaccio © Sébastien Leroy
La nouvelle halle du marché, un incontournable de la gastronomie ajaccienne.
plage de capo di feno à ajaccio © Ithaque
La plage de Capo di Feno à Ajaccio, fin octobre.

Passage par le Sartenais, territoire millénaire

Implantée dans la région de la Rocca, Sartène est la plus vaste commune de l’île avec ses 200 km2 de superficie. "La plus corse des villes corses", comme Proposer Mérimée aimait la nommer, a été fondée en 1550 par les Génois sur l’éperon rocheux du Pitraghju.

Position à la fois stratégique et défensive, le premier village fut érigé à cet emplacement en raison des remparts naturels présents sur le site. Les Génois, afin de doubler la fortification de la place, complétèrent le relief chaotique par la construction d’imposantes murailles. Vestige du bastion de défense, l’échauguette est un monument historique encore visible qui a été édifié à la fin du 16ème siècle et qu’il est possible d’observer depuis la D65, non loin de l’école primaire.

Sartène et le pont de Scaledda.
Sartène et le pont de Scaledda.

Dominant la vallée de ses 300 mètres d’altitude, la ville est composée d’un dédale de petites ruelles pittoresques où il fait bon d’y flâner. D’une architecture traditionnelle, ses hautes maisons en granite sont chargées d’une longue histoire faite d’invasions de pirates et de clans qui s’opposèrent avec fracas.

Sur les hauteurs de la capitale régionale, le Musée de Préhistoire corse et d’Archéologie de Sartène présente les collections les plus caractéristiques de l’archéologie insulaire depuis les premiers peuplements constatés il y a près de 10 000 ans jusqu’à la fin de l’époque génoise au 15ème siècle de notre ère. Une halte bienvenue pour s’immerger dans les origines de la Corse.

Vous pourrez, si vous êtes amateur/trice d'archéologie, partir à la découverte de la légendaire civilisation torréenne et des vestiges du mégalithisme corse. Filitosa compte naturellement parmi les grands sites préhistoriques de la région.

Tous les samedis sur la place Porta, le marché et sa dizaine de vendeurs animent le cœur de la cité. Artisans et producteurs de la microrégion proposent leurs spécialités tant à des natifs avertis qu’à des estivants en quête de saveurs authentiques. Aux terrasses des bars, les Sartenais sont attablés autour d’un café et échangent des mondanités tout en lisant la presse locale au titre blanc sur fond rouge.

Sartène, c’est également un AOC reconnu qui regroupe une dizaine de vignerons et de très beaux philtres dans les trois couleurs.

plage de roccapina © Sébastien Leroy
Existe-t-il plage plus belle que celle de Roccapina ?

Dans sa partie ouest, sur le rivage accidenté, Sartène abrite le port de Tizzano qui émerge sur l’un des flancs de la cala di l’Avena. Endormi jusqu’aux années 1990, ce petit port n’accueillait comme visiteurs que les locaux alléchés par ses eaux poissonneuses et ses trous à langoustes. De nos jours, les constructions ont poussé de part et d’autre de la rue principale et les vacanciers profitent de sa plage très animée durant la période estivale.

Localité de villégiature, Tizzano et son port de plaisance sont un point de départ idéal pour randonner jusqu'au phare de Senetosa, ou explorer la côte sauvage et sa constellation de très belles plages comme Tralicetu, Erbaju, ou encore Roccapina. Avec son lion iconique et sa plage de sable blanc, Roccapina mérite qu’on s’y attarde pour découvrir son histoire et ses atouts tels que sa tour génoise.

Sur les traces des "orii" de l’Extrême-Sud

Haut lieu du pastoralisme, les premiers bergers de l’île sont des nomades itinérants qui se déplacent au rythme du troupeau. Sur les chemins de transhumance, ils vont ériger au fil des siècles des bergeries et des abris sous roche, que l’on nomme "orii" en corse.

Bâtis sur un modèle standard, ces refuges sont aménagés sous un imposant roc à l’aspect façonné par l’agression de l’érosion, ou taffonisation (du corse "taffone" signifiant "trou"). Les éléments, comme la pluie, la neige, ou encore les embruns creusent la roche, donnant naissance à d’étonnantes structures composées d’une cavité ; laquelle est scellée par un mur en pierres.

Ces abris étaient destinés aux hommes et aux bêtes qui trouvaient un asile bienvenu lors des intempéries. Dans l’extrême sud de la Corse, microrégion aux multiples richesses, ces petites demeures troglodytes sont disséminées sur le territoire et émergent au beau milieu du maquis.

oriu di i canni sotta porto-vecchio © Bruno Brumart
Un abri sous-roche bien caché dans le maquis corse.

Sur la commune de Sotta, après seulement quelques minutes de marche, il est possible de découvrir un édifice minéral surprenant qui est chapeauté d’un remarquable bonnet pointu : l’Oriu di i Canni. Représentatif de la rudesse de la vie qu’avaient les bergers autrefois, cet oriu possède une salle unique dont la hauteur sous la voûte permet à une personne de se tenir debout.

À l’extérieur, il est observable que l’énorme bloc de pierre a été poli par le temps, les courbes étant plus douces et moins abrasives. En se promenant autour du monolithe, le site offre une superbe vue dégagée sur le hameau de Canni et la vallée qui se trouvent en contrebas.

oriu de monaccia d'aullène © Sébastien Leroy
L'oriu de Monaccia d'Aullène.

Un peu plus à l’ouest est enraciné sur le flanc de la montagne une autre de ces singularités architecturales : l’Oriu de Monacia-d’Aullène. Après une petite heure sur le sentier du patrimoine magnifiquement remis en état, les grottes protégées de leur mur apparaissent. Ce lieu de dilettante, avec ses grandes pierres plates, est propice pour pique-niquer et pour profiter du panorama sur la mer Méditerranée. 

L'insolite Ermitage de la Trinité

Probablement occupé avant l’époque chrétienne, ce site chargé de spiritualité et d’un calme absolu réunit un ermitage, un oratoire, et un ensemble de rochers granitiques dit "grotte de la Vierge". Au milieu de ce décor typiquement méditerranéen composé de chênes, d’oliviers, et d’un maquis odorant où l’on retrouve toutes les essences de ce biome, est arrimé l’Ermitage de la Trinité.

À seulement 5 kilomètres de la cité des falaises, cet endroit insolite perché à 200 mètres d’altitude surplombe les bouches de Bonifacio et laisse les curieux contemplatifs face au spectacle qui est offert.

Au tout début de la christianisation de la Corse, il semblerait que le lieu ait été occupé par des ermites avant que ne soit construit plus tardivement, au 9ème siècle, une église carolingienne. S’y installèrent ensuite les Bénédictins, puis les Franciscains, qui vont progressivement agrandir l’église au fil des siècles.

En 1912, un mur pignon est mis en place et la façade fraîchement rénovée voit ses deux pilastres latéraux prolongés pour encadrer sa partie supérieure.

chapelle bonifacio © Sébastien Leroy
Les petites croix blanches habillent le paysage bonifacien.

Peuple de navigateurs, comme en témoigne le cimetière marin de Bonifacio, les Bonifaciens étaient exposés aux fureurs de la mer. Reconnaissants d’échapper miraculeusement à un péril et d’avoir la vie sauve, les marins ou leurs familles déposaient un objet dans un lieu saint en remerciement d’une grâce accordée. Ces objets, que l’on nomme ex-voto, sont nombreux au cœur de l’Ermitage de la Trinité et prennent la forme d’un tableau, d’une plaque de marbre gravée, ou encore celle d’une maquette.

Jouxtant l’Ermitage, l’oratoire Notre-Dame de Tibhirine est dédié au souvenir des sept moines de l’abbaye Notre-Dame de l’Atlas qui furent enlevés, puis assassinés, lors de la guerre civile algérienne en 1996. Consacré en 2006, c’est un lieu de mémoire pour les 7 martyrs béatifiés en décembre 2018 à Oran.

Après s’être recueilli, il est possible d’atteindre le sommet du Mont de la Trinité ou de se rendre à la plage de Paragan dont l’eau translucide est une invitation à faire un plongeon. 

Débarquer sur la cité des falaises

Aux confins méridionaux de l’Île de Beauté se trouve un espace incomparable fait de falaises calcaires qui donnent le vertige. Ce joyau brut, sculpté par la force de la houle et des vents, est blotti dans la Réserve Naturelle des Bouches de Bonifacio.

falaises de bonifacio © Sébastien Leroy
Les falaises de Bonifacio s'abordent à la voile ou par la route.

Reconnue pour sa richesse environnementale et patrimoniale, la réserve s’étend sur 80 000 hectares entre la Corse et la Sardaigne, ce qui en fait la plus grande réserve naturelle de France métropolitaine. Avec 37% des espèces remarquables de Méditerranée recensées dans son aire géographique, elle est un refuge providentiel pour la faune et la flore. En flânant le long des falaises, il est courant d’observer les goélands planer au-dessus de l’eau turquoise alors qu’une myriade d’embarcations s’activent dans un bal incessant.

Elles conduisent les estivants au pied de ces colosses de calcaire à l’éclat étincelant ainsi qu’aux nombreux points d’intérêts du secteur, comme les grottes marines, les plages, ou encore le gouvernail de la Corse.

Point le plus au sud, Capo Pertusato est avec sa plage de pirates sortie d’un conte un endroit plein de magie. Depuis le phare sur les hauteurs, qui guide les marins dans le détroit, le panorama sur les bouches et la Sardaigne est à couper le souffle. En plein cœur de ce site unique est également ancrée une presqu’île du bout du monde qui invite à la rêverie.

porte entrée bonifacio © Sébastien Leroy
Les génois fortifièrent Bonifacio pour en faire une place imprenable.
église bonifacio © Sébastien Leroy
L'architecture de charme de Bonifacio.

Connue depuis l’Antiquité pour son port abrité et suffisamment profond, Bonifacio n'a cessé de se transformer pour passer d’un petit port de pêche au 12ème siècle à une forteresse imprenable au 17ème siècle. Haut lieu stratégique au carrefour des routes marchandes, la République de Gênes - qui a administré la cité durant de nombreux siècles - a fortifié la ville au gré des attaques pour en faire une place forte.

L’allure qu’on connaît aujourd’hui à la citadelle, avec ses bastions et ses murs d’enceinte monumentaux, date de 1668. 

Jeter l'ancre (ou presque) près des Lavezzi et et de Cavallo

Entre la Corse et la Sardaigne se trouvent deux petits cailloux brûlés par les rayons du soleil. Implantées à seulement deux kilomètres de distance de la côte, les îles de Cavallo et de Lavezzi émergent des profondeurs. Bordées par une eau à la couleur azur, elles ont des allures d’atolls du Pacifique.

Cette destination de rêve entre luxe et beauté immaculée fait partie d’un ensemble de 8 îlots qui est communément appelé "archipel des Lavezzi". Il est le vestige d’un couloir terrestre qui reliait la Corse et la Sardaigne il y a approximativement 20 000 ans, ce qui n’en faisait en ce temps-là qu’une seule et même île.

Îles Lavezzi, Corse. © Telperion
Des voiliers mouillent dans une crique des îles Lavezzi.

Documenté par de nombreux historiens, il semblerait que cet étroit passage aujourd’hui disparu ait été d’une grande importance pour la circulation entre la Corse et la Sardaigne, comme en atteste la présence d’abris sous roche.

Et votre voyage ne vous mènera pas plus loin. A moins que vous ne songiez à traverser jusqu'en Sardaigne...

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Le port de Limeni dans le Magne, Grèce. Église San Michele de Murato, Corse. Nuraghe de Santu Antine, Sardaigne.

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