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via domitia

Parcourir l’antique Via Domitia, à la découverte des hauts lieux de la Provence romaine

Par Mathilde 9 min. de lecture
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Aujourd’hui, je vous invite à remonter le temps, en suivant la voie domitienne (ou "via domitia"), et en s’arrêtant sur les sites archéologiques et monuments immanquables de l’Antiquité provençale. Je vous emmène dans un long périple, des Pyrénées aux Alpes, lors duquel quelques haltes s’imposent…

Au sommaire
  • La Via Domitia (Voie Domitienne), première route entre Rome et la Gaule
  • Explorer 13 sites, monuments et hauts lieux de la Provence antique
  • La carte de la Via Domitia

La Via Domitia (Voie Domitienne), première route entre Rome et la Gaule

Construite 118 av. J.C., la via domitia ou "voie domitienne" n’est autre que la plus ancienne voie romaine. Il s’agit de la première route créée par les Romains en Gaule. 600 km pour relier l’Italie à la péninsule Ibérique en passant par la Gaule narbonnaise.

Elle permettait la communication entre les petites cités de Gaule et la grande ville de Rome, et a permis d’apporter plus de cohérence entre toutes les routes qui existaient à l’époque. “Tous les chemins mènent à Rome” : l’idée de la via domitia était en effet de relier toutes les voies jusqu’à la "città eterna".

borne miliaire via domitia © Ithaque
Une borne miliaire de la via domitia au Musée de la Romanité, à Nîmes.

Elle a d’abord permis, et en priorité, la circulation des légions romaines et des voies postales puis elle a rapidement été empruntée par les marchands : la via domitia a aidé à développer les échanges entre les cités et ainsi, l’économie locale.

Les villes de Béziers, Montpellier, Nîmes, Cavaillon, Apt, Gap, Briançon se retrouvent aujourd’hui… sur son parcours. D’ailleurs, quelques routes modernes comme l’autoroute A9 empruntent quelques tracés de la via domitia.

Route, autoroute, chemin… Mais comment les Romains l’ont-ils construite ? La via domitia est en quelque sorte une fosse remplie de sable, de cailloux et de mortier. Des pierres étaient ensuite disposées inclinées tout au long et au bord de la voie pour éviter que la pluie ne vienne s’écouler sur son chemin.

Explorer 13 sites, monuments et hauts lieux de la Provence antique

En partant d’Italie, plus exactement de la ville de Suse (Segusio), la via domitia traverse les Alpes par le col de Montgenèvre, elle descend la vallée de la Durance et longe le Luberon en passant par le Nord, elle franchit ensuite le Rhône à Beaucaire et passe par la ville de Nîmes, appelée à l’époque Nemausus, elle suit ensuite le golfe du Lion pour rejoindre l’Espagne.

Sur sa route, on peut découvrir encore aujourd’hui les vestiges d’hier. Il s’agit majoritairement de bornes milliaires, les panneaux indicateurs de l’époque qui informaient des distances entre les villes, des portes, des ponts ou encore des arcs de triomphe.

voie domitienne pavée en provence © Armelle LLobet
Sur les traces des routes romaines en Provence.

Le site archéologique de Panissars et les vestiges du Trophée de Pompée

Entre la Gaule et l’Hispanie, au sommet des Pyrénées, érigeait autrefois un monument élevé, une tour, de près de 60 mètres de haut. Il s’agissait d’un “trophée”, construit en l’honneur de Pompée. En l’honneur de Pompée ? Oui, et apparemment le monument était surmonté d’une statue, décorée des noms de ses 876 conquêtes dans cette province.

Aujourd’hui, ce ne sont que ses ruines qui sont visibles, découvertes par l’archéologue Georges Castellvi en 1984. Ce sont des fouilles plus poussées d’un petit tronçon de la via domitia qui ont permis de découvrir ce monument et d’en faire des reconstructions.

La tour du col, ou ce qu’il en reste aujourd’hui, marque le début de la via domitia ; ou plutôt, elle est le point central entre la via domitia vers la Gaule et la via Augusta qui mène vers l’Hispanie.

L’oppidum gallo-romain de Ruscino

A 5 km de Perpignan, sur un promontoire qui domine la vallée de la Têt, on retrouve l’ancienne cité de Ruscino… Du moins, ses vestiges. Il ne reste pas grand chose aujourd’hui de cette cité, pourtant elle regroupait à l’époque tout ce qui faisait d’une cité ce qu’elle est : quelques habitations, un réseau d'égouts, des termes, un bâtiment faisant office de lieu de réunion et un forum. Les habitations suivaient toutes le même plan : un vestibule débouchant sur un atrium communiquant, quant à lui, sur une pièce principale, une salle de réception. A l’arrière, on retrouve quelques jarres qui permettaient de regrouper les denrées et des dépendances.

Ruscino a donné son nom à Roussillon, et notamment à Château-Roussillon, commune où il se trouve. Et cette ancienne cité est inscrite comme monument historique depuis 1954.

La nécropole de Narbonne

Narbonne est elle-même une cité née au bord de la via domitia, Narbo Martius. La voie romaine ou, du moins, des tronçons traversent encore la ville aujourd’hui. Parmi les vestiges de la ville, une nécropole romaine a été découverte en 2019. Les fouilles sont encore en cours.

Ce “quartier funéraire” de près de 2 000 m2 pourrait abriter près de 1000 sépultures, très bien conservées qui plus est. Il s’agit d’un lieu unique qui va permettre d’en apprendre un peu plus sur les rites, croyances et pratiques funéraires du peuple romain. Au-delà des tombes elles-mêmes ont été découverts jusqu’à présent des vases en terre cuite qui accompagnaient les morts, des flacons en verre, des lampes à huile ainsi que des amulettes…

Le pont romain de Saint-Thibéry

Certaines hypothèses avancent que ce pont de Saint-Thibéry permettait à la via domitia de franchir l’Hérault. Selon d’autres, plus récentes, le pont de Saint-Thibéry nous vient de l’époque médiévale (entre 1150 et 1250). S’il ne s’agit que d’hypothèses aujourd’hui c’est que le tracé de la voie domitienne dans cette région est incertain…

Ce que l’on sait pour sûr, c’est que ce pont a été construit avec de la pierre volcanique du mont Ramus et qu’il comportait neuf arches au total. Seules quatre subsistent aujourd’hui. C’est d’ailleurs cette architecture, avec des avant-becs et arrière-becs, qui fait penser à une construction romaine.

L’oppidum d’Ambrussum et le pont d'Ambroix

Ambrussum est aujourd’hui une aire de repos sur l’autoroute A9, entre Nîmes et Montpellier, ce qui est amusant puisqu’il s’agissait à l’époque d’une station routière avec des berges, des rues, des écuries…

Le site archéologique d’Ambrussum est en accès libre. Et il est possible d’en savoir un peu plus sur le site grâce au musée du même nom.

pont romain d'ambroix © Romilphoto30
Les vestiges du pont romain d'Ambroix.

Ainsi, on sait que le site d’Ambrussum regroupe une station routière, un rempart (classé monument historique), un ensemble de voies pavées, des thermes romains, un pont ou plus exactement, le pont d'Ambroix classé monument historique en 1840 et peint par Gustave Courbet. Le pont Ambroix comptait à son époque onze arches. Aujourd’hui, il y en a seulement une qui se dresse dans le Vidourle.

Ambrussum est aujourd’hui un des sites majeurs pour la recherche archéologique sur la romanisation du sud-est de la France.

Les vestiges de la cité de Nîmes

Nîmes était un village que les Romains ont transformé en ville, Nemausus, une des plus grandes agglomérations de la Narbonnaise. La maison carrée, les arènes ou amphithéâtre de l’époque ou encore la tour Magne témoignent aujourd’hui de la grandeur de la cité hier. Pour vous dire si elle était importante, les citoyens avaient même accès à l’eau courante, grâce au Pont du Gard, un des plus grands ouvrages du monde romain.

maison carrée à nîmes © Ithaque
La célèbre Maison Carrée au cœur de Nîmes.

La via domitia entrait dans la ville par la porte d’Auguste, encore visible aujourd’hui, et la traversait par ce qui est devenue aujourd’hui la rue Nationale.

Les colonnes de César

A la sortie de la ville de Beaucaire, les colonnes de César sont en fait trois bornes milliaires de l’époque romaine. Ces trois bornes qui datent des règnes d’Auguste, de Tibère et d’Antonin, permettaient à l’époque d’annoncer les distances à la sortie de la ville de Beaucaire.

Depuis 1963, elles sont classées au titre de monuments historiques. Aussi, à une dizaine de kilomètres de là, on trouve une autre borne : la Pierre des fiancés qui avait été érigée en l’honneur justement de Tibère.

colonnes de césar à beaucaire © JCL Paca
Les trois colonnes antiques de Beaucaire.

Le site archéologique de Glanum

Aux pieds des Alpilles, à l’entrée de Saint Rémy de Provence se trouve une cité antique de l’empire romain, Glanum, site de recherches et de fouilles archéologiques depuis plus d’un siècle. En effet, le site n’a été découvert qu’au début du XXème siècle alors qu’il s’étendait sous un champ d'oliviers et un vieux mas. Les antiques de Glanum, un arc de triomphe ainsi qu’un mausolée, quant à eux ont toujours été visibles, face à Glanum.

La cité de Glanum avait été construite au-dessus d’une source sacrée, présumée thérapeutique. La fontaine, encore visible aujourd’hui après avoir suivi un couloir dallé puis descendu plusieurs escaliers, en est le symbole.

L’emplacement, au milieu de la via domitia, et la présence de cette source ont permis à la cité de se développer. Tout comme la volonté de préserver les Alpilles.

L’arc romain de Cavaillon

L’arc romain de Cavaillon est ce que l’on appelle un tétrapyle, il comporte en effet quatre portes, toutes encore visibles aujourd’hui. Du moins, les piliers fondateurs. Cependant, cet arc de Cavaillon n’est qu’un vestige de ce qui était à l’époque romaine un bâtiment (encore non identifié). Ce qui est particulièrement intéressant aujourd’hui, à venir contempler, ce sont les sculptures sur chaque piliers… Feuilles d’acanthe, frises d’oves, divinités ailées.

arc romain cavaillon © Pierre Jean Durieu
L'arc romain de Cavaillon, déplacé en centre-ville.

A savoir : l’arc de Cavaillon ne se situe pas là où il a été construit. Il a en effet été démonté puis transporté sur la place principale de la ville en 1793. Pour autant, il se trouve encore sur la voie de la via domitia.

Le pont Julien

Le pont Julien est un autre pont romain, datant quant à lui du IIIème siècle av. J.-C. La chaussée antique de la via domitia, en amont et en aval du pont, est encore visible aujourd’hui. Le pont permettait à la voie de traverser le Calavon, rivière qui s’écoule dans la région. Il fait 80 mètres de long, et il est composé de trois arches dont une centrale plus élevée.

Il faut savoir que ce pont, en calcaire du Luberon, était encore utilisé en 2005. Une déviation a ensuite été créée afin de préserver ce vestige romain. Pour autant, il peut encore être emprunté… à vélo ! Le pont Julien intègre en effet la véloroute du Calavon (projet cofinancé par l’Union européenne).

pont romain pont julien sur la rivière Calavon © Chdecout
L'antique Pont Julien enjambe le Calavon.

Le pont de Lurs

Quelques kilomètres plus loin, le pont de Lurs fait quant à lui 30 mètres et ne compte qu’une seule arche. Lui permettait le passage entre la ville de Lurs, d’où vient son nom, et de Ganagobie. Une particularité de ce pont est qu’il présente sur l’un de ses piliers, une gravure de phallus, symbole de force pour les constructeurs selon certains, signe destiné à protéger les passants selon d’autres. Le pont de Lurs a été classé monument historique en 1963.

Les traces de la cité de Briançon

La cité de Briançon est très ancienne, et elle a toujours été un carrefour important. Un passage obligé entre la France et l’Italie par les montagnes. Il y a peu de restes et vestiges de la cité ancienne de Briançon cela dit…

Ce que l’on peut voir surtout aujourd’hui, ce sont les restes de voûtes d’un potentiel aqueduc, des traces de thermes ou encore quelques traces de nécropole. Enfin ont été découvertes aussi les traces d’une ellipse, à Sainte Catherine, qui laissent supposer la présence d’un amphithéâtre.

Ce ne sont que quelques traces et quelques restes, moins visibles que les autres sites sur l’itinéraire de la voie domitienne… Mais toutes laissent supposer l’importance de la cité qui faisait lien entre la France et l’Italie.

Summae Alpes

On termine dans le col de Montgenèvre, passage le plus bas pour traverser la frontière franco-italienne ou gallo-romaine. Il permet aujourd’hui de relier Briançon en France et Cesana Torinese en Italie. Ce n’est pas un monument ni un site archéologique mais un lieu important pour la via domitia qui marque la fin de son itinéraire pour l’Italie… ou le début pour partir explorer ensuite la Gaule narbonnaise.

De l’autre côté, en Italie, toutes les voies mènent à Rome. Le tracé traversant la Gaule narbonnaise, la via domitia, s’arrête aux frontières mais peut-être n’a-t-elle pas fini de nous faire découvrir les traces de notre histoire. Partez à la découverte de la voie domitienne et peut-être découvrirez-vous de nouvelles traces…

La carte de la Via Domitia

Pour vous permettre de mieux visualiser le parcours originel de la voie domitienne, voici la carte proposée par Wikipedia :

Carte de la via domitia, voie romaine en provence © Wikipedia
La carte de la Via Domitia, traversant le sud est de la Gaule.

Bonne route !

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